Dans l’épisode précédent vous avez pu lire comment je m’habituais à cohabiter avec mon eczéma. A l’heure actuelle (avril), il est parti, peut-être que les beaux jours lui ont donné envie d’aller se promener un peu à la campagne ou au bord de la mer. Peut-être qu’il reviendra, peut-être pas, seul l’avenir nous le dira. Pour le moment, laissez-moi vous raconter la suite de mes aventures de ce début d’année !
Tandis que je m’habituais à cohabiter avec mon eczéma mon corps a décidé de me challenger un peu et d’ajouter un petit Covid par-dessus. Si je n’ai pas trop souffert (un jour de courbatures et un peu le nez bouché le reste du temps), cela a fait exploser mon eczéma. Charline m’a surnommée « mon petit clafoutis », du coup pour la remercier je lui ai refilé le Covid. Et à d’autres aussi, parce que je suis quelqu’un de généreux, c’est comme ça. Bref, je rigole mais je n’étais pas super fière de contaminer mon entourage, heureusement tout le monde s’en est bien sorti !
Maitresse Gilda
Alors que je guérissais de mon Covid et que je tentais de trouver une solution diplomatique face à l’invasion de mon corps par mon eczéma (« ok, on cohabite mais c’est pas la fête du slip non plus, il va falloir se calmer maintenant »), j’ai eu la tristesse d’apprendre le décès d’une collègue. J’ai ouvert une bonne bouteille de rouge (vous voyez, quand je vous dis que les bonnes bouteilles sont des cadeaux utiles) et je me suis roulée en boule sur mon canapé pour pleurer tout en contactant un tas d’amies pour leur apprendre la nouvelle. Parce que, en réalité, pour pas mal d’entre nous, ce n’est pas « qu’une collègue », non c’était bien plus que ça.
Certains ont peut-être déjà vécu ça dans leurs vies professionnelles (ou dans leur vie tout court) : la rencontre avec une personne qui vous éblouie tellement que vous vous dites « Whao…je veux être comme lui/elle plus tard ». Ce lui/elle pour moi, c’était Maitresse Gilda. Je me rappelle de mes débuts dans le militantisme TDS, je n’avais d’yeux que pour elle, pour sa flamboyance en manif et pour sa verve en interview. Aux Assises de la prostitution de 2012 elle était arrivée à la bourre, au début je ne l’avais pas reconnue, elle était habillée en mec et il y avait pas mal de monde. Puis, elle a pris la parole et le monde s’est arrêté de tourner pour moi, je crois que j’ai même oublié de respirer l’espace d’un instant. Je ne pourrais même plus vous dire ce qu’elle racontait, c’était sur la lutte des TDS évidemment, pas sur Madonna, mais je me rappelle très bien de son assurance, de son aura qui me clouait littéralement sur ma chaise.
C’était un modèle militant mais aussi un modèle dans d’autres pans de la vie. Une dominatrice professionnelle, d’une douceur, d’une gentillesse incroyable, toujours prête à aider ses collègues, à remonter le moral des troupes et à faire rire. Enfin, je dis ça mais tout le monde ne serait pas d’accord avec moi parce que Gilda c’était surtout une combattante et elle avait une niaque et une colère incroyables. Quand je la voyais sur Facebook ou Twitter commencer à batailler je restais scotchée à l’écran, elle était magnifique, drôle et acide même face aux cons. Bref, c’était Maitresse Gilda et depuis quelques semaine le monde est un peu moins joli.
Photos : Peter Hönnemann
Je vous laisse aussi une interview d’elle que j’aime bien : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/close-to-kids/portrait-de-maitresse-gilda-3890235?fbclid=IwAR0fx-wOYLEcQkn7kM7m4L-dRF3EoBsaiJk64m1P0Vl12gfpiwMhYEccb6c
Le point positif c’est que mon eczéma a décidé de me laisser tranquille car je devais maintenant cohabiter avec un cœur en miettes qui prenait beaucoup, beaucoup de place.
Versailles
C’est donc accompagnée de mon petit cœur en miettes que je me suis rendue à Paris pour vivre une expérience magique : nous étions tous les deux invités au Grand Contrôle à Versailles.
Nous avons vécu un moment incroyable mais cela n’était pas lié qu’au lieu. Dans les nombreuses choses que mon activité m’a appris sur moi, il y a le fait que vous pouvez m’emmener dans les endroits les plus luxueux ou m’offrir les cadeaux les plus chers, si vous vous comportez comme le dernier des cons ou si vous paraissez blasé des beautés de ce monde, alors vous pouvez être persuadé que cela ruinera totalement mon expérience. Je veux des partenaires qui s’émerveillent tout autant que moi ou qui sont, à minima, heureux de me faire découvrir des choses qui peuvent être habituelles ou fréquentes pour eux sans pour autant en faire trop. Ça vaut pour les endroits un peu luxe/chics mais ça vaut aussi pour tout le reste : si vous m’emmenez à la campagne et que vous vous montrez insensible à la beauté de la nature, que je ne peux partager mon émerveillement face à l’orage qui gronde un soir d’été ou à la neige qui tombe lors d’une froide journée d’hiver, soyez sûrs que cela gâchera une partie de l’expérience.
Bref, revenons à Versailles.
Comme vous l’avez compris, mon cœur en miettes et moi étions très très bien accompagnés. Heureusement que nous avions le masque car je souriais tellement bêtement les premiers temps que cela aurait été gênant (bien qu’ils doivent avoir l’habitude). J’aime ces moments où le sérieux part un peu pour laisser place à notre âme d’enfant, à la folie et aux rires, à l’émerveillement et à la joie. C’était à la fois une expérience intense et tout en légèreté, quelque chose de doux comme leurs matelas à 11500 euros (je ne savais même pas qu’on pouvait acheter des matelas à ces tarifs-là) et d’enivrant comme leur accord mets-vins.
Le matin, malgré la tempête, nous avons pu visiter le Grand Trianon alors qu’il était encore fermé au public et nous avons eu la chance d’avoir une guide absolument passionnante juste pour tous les deux. Ce qui a rendu l’instant encore plus magique à mes yeux c’est d’avoir pu déambuler dans ces vastes salles, sans personne, sans un bruit parfois, avec le grondement du vent dehors et le son de la pluie s’abattant violemment sur ces immenses fenêtres.
Ah oui, et je vous ai dit qu’on était en très bonne compagnie ?
Je suis repartie des étoiles plein les yeux et très heureuse de voir que je ne m’étais absolument pas trompée sur mon prétendant. Je suis impatiente de voir ce que l’avenir de notre relation nous réserve !
J’ai aussi pu commencer à recoller les petites miettes de mon cœur. Je ne fais que sourire dorénavant lorsque je pense à Gilda et je rigole toute seule en repensant à tout ce qu’elle a fait. Comme ce jour où elle a balancé qu’un de ses client rentrait au gouvernement et que ça avait fait un petit buzz.
Du coup, vu que mon petit cœur était un peu mieux et moins encombrant, mon eczéma a décidé de revenir squatter !
Instant auto-promo !
Pour ceux qui suivent depuis un moment mon blog, j’avais annoncé il y a un an et demi que je collaborais à l’écriture d’un livre sur le TDS et depuis, plus rien. Et bah c’est le moment « je me la pète » parce que Cybèle et moi (et mon eczéma), nous avons enfin été publiés !
Ce livre recueille des témoignages de TDS (mais pas que) et les 2 gros chapitres que nous avons écrits. Dans le premier nous abordons la définition du travail du sexe ainsi que le cadre légal et ses conséquences. Dans le deuxième nous parlons des recherches sur lesquelles nous avons planché durant le premier confinement (et les mois qui ont suivis). Il est disponible à peu près partout normalement.
Bon, c’est tout pour moi. Maintenant que j’ai ENFIN fini cet article de blog, je vais peut-être pouvoir passer à autre chose !
Je vous embrasse